Adresser, de la fenêtre d’une maison de Draps et Tissus, une orange à un gamin au moyen d’un pèse-lettres et d’une ficelle ; caresser le souvenir d’une camarade partie pour Madagascar; remarquer un bracelet d’améthystes au poignet d’une passante - voilà, dans cette petite ville, ce dont la vie de Bernard parait être tissée.
Mais qu'entre dans son bureau une inconnue aux tempes trop larges et, en elle comme en lui, déferle une haine violente, inexplicable : lien détesté qui se resserre plus étroitement chaque fois que, cherchant à se fuir, Estelle et Bernard se rencontrent.
Épousant l’aversion d’Estelle, la ville rejette Bernard qui trouve, en marge de la respectabilité, des amis chimériques et dénués ; grâce à eux les bois se font plus proches et la vie, malgré tout, continue. A mesure que ces choses primitives de la province et de la campagne s’affirment, les histoires que Bernard voulait éviter deviennent plus sauvages et plus menaçantes, car Estelle a un frère dont on a caché la naissance et qui appartient lui aussi au monde des réprouvés.
Le Destin passe plusieurs fois - voilé - puis agrippe durement Estelle et Bernard en leur montrant soudain son visage. Il y avait sans doute une raison, combien lointaine et simple, à cette haine, désormais transfigurée.